Bordeaux, le 9 mars 2009 - mise à jour le 07 janvier 2013,
La reconnaissance de la notion de perte de chance de survie, dénommée aussi notion de vie abrégée et maintenant « souffrance morale liée à la conscience de mort imminente ».
En 2007, pour la première fois, en France, un de nos avocats spécialisés dans la défense des victimes d'accidents corporels, a obtenu la reconnaissance de la perte de chance de survie.
En effet, la Cour de Cassation, dans un arrêt rendu le 13 mars 2007, a reconnu qu'une jeune victime décédée à la suite d'une erreur médicale devait être indemnisée au titre de « la perte de chance de n'avoir pas vécu plus longtemps ».
En première instance, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, avait alloué une somme de 110 000 € aux parents de la victime, en reconnaissant ainsi « la perte de chance de survie » de leur fille.
Depuis, nos avocats ont régulièrement plaidé cette notion de perte de chance de survie et ont obtenu gain de cause dans de nombreux tribunaux.
Le 12 février 2008, la Cour d'Appel de Dijon a accordé 30 000 € « à titre de réparation du préjudice né d'une perte de chance sérieuse de survie ».
Le 2 mai 2008, le Tribunal de Grande Instance d’Evreux a accordé aux ayants droits d’une victime d’accident corporel une somme de 40 000 € « sur la notion de perte de chance de survie ».
Le 28 novembre 2008, les juges du Tribunal de Grande Instance de Bourges ont accordé 90 000 € pour « perte de chance de survie avec notion du caractère inéluctable de son décès » à une famille dont la fille avait survécu quelques heures après un accident de la circulation.
Le tribunal a fait référence à l'arrêt de la Cour de Cassation du 13 mars 2007 et a motivé sa décision en précisant « les pièces du dossier montrent que Melle X, qui était avant l'accident en parfait état de santé et âgée de 35 ans, est restée consciente jusqu'à son arrivée à l'hôpital de Bourges, et notamment durant le temps de la désincarcération du véhicule accidenté ; elle a donc nécessairement eu conscience de la gravité de son état et du caractère inéluctable de son décès ».
Le 29 janvier 2009, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux a accordé une somme de 20 000 € à une famille dont le mari et père, âgé de 57 ans, était décédé quelques jours après l'accident.
Les juges ont expliqué que « le préjudice est dans un tel cas lié à la souffrance morale éprouvée, du fait de la conscience chez la victime de sa propre disparition ».
De plus « le fait que la victime se soit trouvée en état végétatif, ne permet pas d'exclure toute conscience de sa part pour refuser une indemnisation ».
Les juges ont motivé leur décision en expliquant que « la victime née en 1950, avait une espérance de vie théorique, compte tenu de l'aléa lié à la vie humaine, de 20 ans environ ».
Le 30 janvier 2009, le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a admis le principe de la perte de chance de survie pour une victime décédée le 6 mai 2005, suite à un accident de la circulation survenu le 27 avril 2005.
Le Tribunal de Grande Instance de Nanterre a justifié sa décision en précisant que « le préjudice né de la perte de chance de survie est admis en matière de responsabilité médicale lorsque la faute médicale a diminué les chances de survie du patient ; lorsque le décès de la victime résulte de blessures reçues lors d'un accident de la circulation, celle-ci a également droit à la réparation de son dommage résultant de la souffrance morale qu'elle a éprouvée entre l'accident et son décès en raison de sa perte d'espérance de vie, peu importe qu'elle soit tombée dans le coma ; ce préjudice étant né dans son patrimoine se transmet à ses héritiers à son décès ».
Compte tenu de l'âge de la victime, le tribunal a alloué une somme de 10 000 € aux héritiers.
Le 14 mai 2009, le Tribunal de Grande Instance d'Agen a accordé à la famille d'une victime d'accident de moto, la somme de 60 000 € en précisant « que la victime, âgée de 23 ans au moment de l'accident, a perdu une chance de voir sa vie prolongée.
Le préjudice est, dans un tel cas, lié à la souffrance morale éprouvée, du fait de la conscience chez la victime de sa proche disparition.
Le fait que la victime était en état de coma ne permet pas d'exclure toute conscience de sa part pour refuser une indemnisation.
La victime avait une espérance de vie théorique de 50 ans environ ».
Le 2 juillet 2009, Le Tribunal de Grande Instance de Poitiers, a admis le principe du préjudice de vie perdue pour un automobiliste décédé dans un accident de la circulation, son véhicule ayant été percuté par une remorque qui s'était détachée d'une voiture venant en sens inverse.
Dans ce jugement, le Tribunal de Grande Instance de Poitiers a accordé 20 000 € au titre « des souffrances morales précédant le décès de la victime ».
Le 5 octobre 2009, le Tribunal de Grande Instance de Nouméa, en Nouvelle Calédonie, a accordé aux parents d'un jeune homme décédé dans un accident de la route, une somme de 134 081,00 €, pour « la réparation du préjudice subi avant son décès ».
Le Tribunal Correctionnel de Nouméa motive sa décision, en précisant que « la jeune victime, âgée de 19 ans, a donc subi entre le moment de l'accident ( 23 heures 30 ) et son décès constaté à 03 heures 30 un préjudice actuel, certain et direct ouvrant droit à réparation et constitué en l'espèce par d'intenses douleurs physiques et morales consécutives à ses blessures et à la représentation, fût-elle temporaire, d'avoir vu ses espoirs de vie brutalement réduits et anéantis ».
Le Tribunal de Nouméa indique « qu'il apparait conforme à l'évolution actuelle de la jurisprudence, d'allouer aux héritiers de la victime, en réparation du préjudice subi avant le décès :
Il a donc été alloué une somme de 125 701,00 € pour une perte de chance de survie pour une jeune victime décédée simplement 4 heures après l'accident.
C'est la première fois que la notion de perte de chance de survie vient d'être reconnue et indemnisée par un tribunal siégeant dans les Territoires d'Outre Mer.
Le 23 juillet 2010, le Tribunal Correctionnel de Nouméa, a augmenté la somme allouée à la perte de chance de survie en la portant à 167 600 €.
Pour les décès résultants d'un accident de la circulation, les Magistrats, voulant faire une distinction avec les victimes d'erreurs médicales, préfèrent parler maintenant « de préjudice de vie abrégée ou préjudice de vie perdue ».
Ils font référence à « la souffrance morale de la victime du fait de la prise de conscience de la vie abrégée ».
Certaines compagnies d'assurance n'hésitent pas à indiquer que cette notion de « préjudice de vie abrégée ou de préjudice de vie perdue » n'est plus prise en compte par les tribunaux.
Il s'agit d'une affirmation totalement erronée.
Simplement, les juges font maintenant référence « aux souffrances morales ressenties par la victime concernant la perte d'espérance de vie ».
C'est ainsi que la Cour d'Appel de Versailles, dans son arrêt du 1er juillet 2010, avait déjà accordé une somme de 10 000 € à la famille d'une jeune personne, décédée des suites d'un accident de scooter, après 10 jours de coma.
Les juges avaient parfaitement expliqué « qu'ils avaient écarté la référence à la perte de chance de survie, pour allouer une somme de 10 000 € pour les souffrances morales ressenties de la perte d'espérance de vie ; qu'eu égard à la durée des souffrances, nées de la conscience, même minimale, en raison du coma survenu, du risque et de l'angoisse de perdre la vie ».
Par exemple, la Première Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de Grenoble, par un arrêt rendu le 28 octobre 2010, a accordé aux ayants-droit d’un jeune homme décédé 6 heures après un accident de voiture, une somme de 5 000 € au titre des souffrances endurées avant sa mort et une somme de 10 000 € au titre de vie perdue ou abrégée.
Pour justifier son arrêt, la Cour d’Appel a expliqué que « Mickaël était décédé plusieurs heures ( 6 heures ) après l’accident et que, pendant cette période, il a souffert des lésions qu’il présentait et que ses souffrances méritent réparation à hauteur de 5 000 € ».
Dans le même arrêt, les juges ont estimé « que la demande faite au titre du préjudice de vie perdue ou abrégée était justifiée par la souffrance morale de se sentir mourir, éprouvée par la victime, pendant ces dernières heures de vie » et la Cour a octroyé une somme de 10 000 € en réparation de ce préjudice spécifique.
Cet arrêt récent de la Cour d’Appel de Grenoble est d’une grande importance car il contredit, catégoriquement, les affirmations des compagnies d’assurance.
En effet, les avocats des compagnies d’assurance, prétendent, à tort bien entendu, que le préjudice de vie perdue ou abrégée ne peut être obtenu que dans le cadre des victimes d’erreurs médicales.
Dans cet arrêt, la Cour a accordé le préjudice de vie perdue ou abrégée aux héritiers d’une victime d’accident de la route, détruisant ainsi l’argument avancé par les assurances.
De façon précise et motivé, les juges ont bien fait la différence entre les souffrances endurées et le préjudice de vie perdue ou abrégée et ont bien indemnisé séparément ces deux chefs de préjudice.
Le 22 avril 2011, la Cour d’Appel de Nancy a précisé « qu’aucun élément du dossier ne permet d’affirmer que la victime ne se serait pas vu mourir ; qu’elle n’a pas pu ressentir une profonde détresse morale devant l’approche de la mort et la perspective d’être arrachée à ses proches de façon imminente et définitive » pour accorder 10 000 € à la famille d’une victime d’un accident de la circulation, décédée, de ses blessures, quelques heures plus tard à l’hôpital de Strasbourg.
La Cour d’Appel a motivé sa décision en indiquant « que les souffrances physiques et morales ainsi ressenties pendant une durée de 25 heures doivent être indemnisées ; qu’eu égard aux circonstances, notamment l’intensité et la durée de ces souffrances, ce préjudice est évalué à 10 000 € ».
Le 21 juin 2011, la Cour d’appel de Douai, a accordé une somme de 30 000 € pour le préjudice de vie perdue ou abrégée à la famille d’un motard décédé le lendemain d’un accident dont un automobiliste a été reconnu responsable.
Les juges ont motivé leur décision en expliquant « que l’état de conscience dans lequel se trouvait la victime lui a permis de se rendre compte de la gravité de ses blessures et de sa mort imminente ».
Les juges ont aussi précisé « qu’il en est résulté une souffrance morale qui s’est traduite par une angoisse qui l’a accompagnée jusqu’à l’issue fatale et qui a pu se manifester par l’agitation constatée par les médecins ».
Pour ce chef de préjudice particulier, les juges ont donc alloué la somme de 30 000 €.
Le 29 juin 2011, le Tribunal de Grande Instance de Bordeaux, vient d’accorder une somme de 12 000 € en réparation des souffrances physiques et morales éprouvées par une jeune victime, qui a péri noyé dans un accident.
Pour motiver son jugement, le tribunal à indiqué que le jeune homme, passager avant de la voiture, « n’est pas mort instantanément car il est mort noyé et que, ne sachant pas nager, il a dû se débattre pour éviter de couler et de se noyer, ce qui a généré une souffrance physique qui s’est perpétuée lors de l’envahissement de l’eau dans ses poumons ».
Le tribunal a ajouté « il est aussi exact qu’il a eu le temps de comprendre qu’il allait vraisemblablement mourir et que la peur de la mort comme le regret de ne pouvoir vivre une vie qui débutait constituent un préjudice moral majeur, eu égard à son jeune âge ».
Plus récemment, le 7 octobre 2011, le Tribunal de Grande Instance de Versailles, vient d’accorder une somme de 70 000 € aux parents d’un jeune homme de 26 ans, décédé 7 jours après un accident de moto.
Le tribunal a évalué à 20 000 € la souffrance physique de la victime « qui a souffert pendant 7 jours, ayant conscience de cette souffrance physique ».
Dans le même jugement, le tribunal a expliqué « que pendant les sept jours s’étant écoulés entre l’accident et le décès, le blessé était suffisamment lucide pour comprendre la gravité de la situation et espérer échapper à la mort suite aux soins prodigués par le corps médical tout en redoutant l’issue fatale compte tenu de ses nombreuses blessures ».
Le Tribunal de Grande Instance de Versailles a fait une juste estimation de la souffrance morale de la victime en accordant 50 000 € à ses parents.
Pour motiver leur décision, les juges expliquent « que ce jeune homme, qui, juste avant l’accident, voyait s’ouvrir devant lui un bel avenir fait de bonheurs divers ( amour, enfants, voyages ...) au fil des jours séparant l’accident de sa mort a vu cette espérance diminuer pour disparaître le jour de son décès ».
Le 22 novembre 2011, le Tribunal de Grande d’Instance d’Evreux vient d’accorder la somme de 20 000 € pour la perte de chance de survie d’un jeune homme qui avait survécu une heure à ses blessures.
Compte tenu que cette personne a présenté un coma dans les suites immédiates de l’accident, il avait été demandé une expertise médicale pour déterminer s’il existait « une perception de la souffrance physique au cours d’un coma vigile ».
Les médecins experts judiciaires affirment « que la perception de la souffrance physique au cours d’un coma vigile est certaine ».
Les experts vont même préciser que « de 14 heures 30 à 15 heures 30, soit pendant une durée d’une heure, le coma est vigile et agité et qu’il y a donc la conscience d’une souffrance et que de 15 heures 30 à 16 heures 45, il ne s’agit pas d’un état végétatif persistant mais d’un coma profond avec une activité circulatoire aléatoire et que la perception douloureuse reste possible ».
Le Tribunal a motivé l’évaluation de la perte de chance de survie à 20 000 € en indiquant « compte tenu de la reconnaissance par les experts de la conscience d’une souffrance dans l’heure qui suit l’accident, il y a lieu de considérer qu’il existe des éléments médicaux et une possibilité que la victime se soit vu mourir et ait ressenti une profonde détresse morale devant l’approche de la mort et la perspective d’être arraché de façon définitive et imminente à ses proches ».
Ainsi le Tribunal, conformément à l’avis des médecins experts qui indiquent que « le fait que la victime ait été dans le coma ne permet effectivement pas d’exclure toute conscience de la part de la victime » a donc accordé une somme de 20 000 € à la famille de la victime pour la perte de chance de survie.
Conjointement, le tribunal a aussi alloué une somme de 15 000 € pour les souffrances endurées, c'est-à-dire pour indemniser « toutes les souffrances physiques et psychiques ainsi que les troubles associés endurés par la victime le jour de l’accident ».
Ce jugement est d’une grande importance et cela à double titre.
Tout d’abord parce qu’il reconnait l’existence d’une perte de chance de survie (de 20 000 € ) pour une victime décédée après une heure de coma.
Ensuite, parce qu’il indemnise aussi et de façon distincte les souffrances endurées par la victime.
Nous pourrions vous donner de très nombreux autres exemples de jugements obtenus par les avocats de l’Association qui prennent en compte « la souffrance morale liée à la conscience de mort imminente ».
Le Tribunal de Grande Instance de Pointe à Pitre, dans son jugement du 2 février 2012, a accordé à la famille d’une jeune victime décédée le lendemain de l’accident, une somme de 15 000 € au titre de la souffrance morale de la victime.
Le tribunal a fait une juste appréciation de « la souffrance morale éprouvée par la victime avant son décès en raison de l’angoisse de perdre la vie, de la conscience de la mort immédiate ».
Le tribunal explique sa décision en indiquant « qu’aucun élément ne permet d’exclure le fait que la victime, dont le décès a été constaté le lendemain de l’accident, ait eu conscience de sa mort imminente et en ait éprouvée une souffrance morale ».
De la même manière, le Tribunal de Grande Instance de Dax, dans un jugement du 2 avril 2012, a allouée une somme de 17 000 € pour un cycliste décédé 4 heures après un accident.
Le tribunal a motivé son jugement, en indiquant « que pendant ce laps de temps de 4 heures, et même si la victime a été sédatée rapidement puis dans un état de coma, il n’en demeure pas moins qu’elle a droit à la réparation de la souffrance morale qu’elle a éprouvée en raison de la perte de son espérance de vie ».
Les juges du Tribunal de Grande Instance d’Arras ont accordé, le 28 septembre 2012, une somme de 10 000 €, pour la souffrance morale liée à la conscience de mort imminente, à la famille d’une victime décédée 24 heures après l’accident.
Les juges ont parfaitement motivé les raisons de l’attribution de cette indemnisation spécifique.
Tout d’abord, les juges ont rappelé que « même si les autres protagonistes de l’accident indiquent que la victime dormait sur la banquette arrière de la voiture, il est établi que le décès n’a pas été immédiat ».
Ils ont ensuite rappelé « qu’il résulte des éléments du dossier qu’il existe une possibilité, même brève, que la victime se soit vue mourir, alors qu’il n’est même pas établi qu’elle était dans le coma, et alors que le responsable de l’accident rapporte qu’elle lui a serré la main, ce qui peut caractériser, même fugitivement, une détresse morale devant l’approche de la mort ».
De plus, les juges ont accordé une somme de 10 000 € supplémentaire pour le préjudice des souffrances endurées au motif que « la victime présentait des spasmes au niveau du ventre et râlait, ce qui permet d’estimer que la perception de la souffrance reste probable, bien que difficilement quantifiable ».
Par un jugement du 18 décembre 2012, la Cour d’Appel de Basse Terre, en Guadeloupe, a confirmé, en tous points, je jugement en première instance du Tribunal de Grande Instance de Pointe à Pitre, qui, le 2 février 2012, a accordé à la famille d’une jeune victime décédée le lendemain de l’accident, une somme de 15 000 € au titre de la souffrance morale de la victime.
Le tribunal a estimé que « c’est à bon droit que le premier juge, compte tenu du fait que le préjudice résultant des souffrances morales est distinct des souffrances physiques endurées, en ce qu’il représente la souffrance morale éprouvée par la victime avant son décès en raison de l’angoisse de perdre la vie et de la conscience de la mort immédiate, a estimé qu’il convenait de retenir ce poste de préjudice ».
Il est aussi « qu’aucun élément ne permet d’exclure le fait que la victime, dont le décès a été constaté plusieurs heures après l’accident, ait eu conscience de sa mort imminente et en ait éprouvé une souffrance morale ».
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